Tianjin est une grande ville internationale, même si dans le reste du monde personne ne sait où c’est. La preuve: les puissants de ce monde s’y sont réunis, sous le titre « Tianjin, Davos l’été » . Mon ami Alain, qui étudie le français et m’aide à faire des progrès en chinois,y était comme interprète bénévole. La réunion s’est terminé hier soir. Je n’étais pas invité aux réunions ni aux réceptions, mais quand même de charmantes étudiantes de l’institut des langues étrangères m’ont vu passer dans la rue et m’ont demandé de signer sur une belle affiche verte pour montrer mon « goodwill » (qu’est-ce que ça signifie ? )
Ma photo avec elles et l’affiche paraîtra peut-être dans le compte-rendu.
Je suis aussi passé à la grande librairie pour contempler le rayon des méthodes pour apprendre l’anglais.
Les hautes piles à gauche sont des dictionnaires. Les rayons au fond portent tous le titre « manuels d’anglais ». Le français a quand même droit à cinq ou six mètres d’étagères, plus que le coréen et presque autant que le japonais. Et pourtant, dans ma belle-famille, il n’y avait personne ou presque qui parle anglais. Juste quelques uns dans la jeune génération, mais ils ne s’en servent pas beaucoup.
Mais je savais qu’il y avait quelqu’un de la famille à Houston, Texas. J’avais d’abord compris que c’était un oncle (le frère de mon beau-père); ma chère épouse en parlait comme d’un « grand frère ». En fait c’est un cousin (le fils du précédent). Et il est à Tianjin, pour la première fois depuis des années, pour voir la famille.
Le voila donc avec ses trois nièces, les filles uniques de mes beaux-frères. Nous sommes au restaurant pour dîner en famille (en ville, personne n’est assez grandement logé pour mettre vingt personnes à table). La jeune fille de gauche est à marier, de même que son cousin, le fils de mon épouse. A la question : « A-t-elle un petit ami ? » mon épouse répond « Non ! En Chine on se marie d’abord. » C’est d’une grande hypocrisie; elle-même n’a pas pratiqué comme cela avec moi. L’oncle d’Amérique a un garçon du même âge. Dans les temps anciens, les parents les auraient peut-être mariés.
Je profite de l’occasion pour vus faire visiter un restaurant pour repas de famille. Celui-ci n’a pas de thème particulier.
Nous sommes à l’étage. Dans le vestibule, les trois signes du lieu distingué: un pot grandiose, une calligraphie (une des mille variantes du caractère shoulongévité), et un dessin sur rouleau de papier (déroulé).
Il représente justement un restaurant du temps des empereurs Qing. Sur le petit bout que vos voyez, l’entrée et deux deux cabinets particuliers qui accueillent la compagnie sur un kang, une plateforme chauffée par un fourneau (près de la porte) qui sert à finir de préparer les plats.
Il n’y a plus rien de tout ça. A l’entrée on rencontre le comptoir des alcools et des cigarettes; les boisson ne sont pas sur la carte, on peut les apporter ou les acheter là.
Le couloir dessert une douzaine de salles à manger avec une ou deux grandes tables rondes.
L’oncle d’Amérique compte son argent. Il va distribuer des cadeaux aux jeunes, mais il a oublié d’apporter des enveloppes rouges.
Maman apprend à son petit garçon à refuser poliment le cadeau de son grand-oncle, puis à l’accepter la troisième fois.
Sur la table du banquet, trois bouteilles ouvertes de boissons pour les grandes personnes: Wuliangye (esprit des cinq céréales), Gujing gong jiu (vin du vieux puits), et du whisky irlandais qui a voyagé dans ma valise. Retenez la marque du premier, c’est très chic, et aussi nettement plus moelleux que le baijiu ordinaire. Il manque la bouteille de whisky canadien de l’oncle d’Amérique.
Sur le gâteau: fu ru donghai , shou bi nanshan. Que ton bonheur soit comme la mer de l’Est, ta longévité comme la montagne du Sud (comme chacun sait, la mer de Chine est toujours calme, et les montagnes durent longtemps). C’est ce qu’on met sur les gâteaux d’anniversaire pour les anciens, sur les banderolles, sur les images qui attirent le bonheur. Nous avons apporté le gâteau à la crème, commandé au Holiland du quartier; c’est un échafaudage de génoise aux fruits, décoré par un virtuose; la crème est à peu près immangeable mais ça fait grand plaisir à regarder au milieu de la table.
Photo de groupe avant de commencer à manger. Le plus jeune de l’assemblée (on n’a pas pu le garder sur la photo, il s’intéressait à autre chose; c’est moi qui l’ai rajouté) a ici un arrière-grand-père, une arrière-grand-tante, un grand-père et une grand-mère, deux grand-oncles, une grand-tante (plus les pièces rapportées dont je fais partie), une maman et un papa, deux tantes (filles des grand-oncles) et le mari de l’une d’elles; il manque son oncle (fils de sa grand-tante) qui travaille, et toute la famille du côté de son papa. Si la loi sur l’enfant unique continue d’être appliquée (c’est la deuxième génération), il n’aura que trois cousins et cousines du côté de sa maman. C’est plus ou moins la même chose dans pas mal de familles en France, mais au moins on peut choisir, pas ici.
Pas d’images du repas. A part qu’on utilise des baguettes et qu’on boit le whisky en mangeant et pas avant, c’est comme ailleurs. C’était très bon, et il y avait beaucoup trop à manger; il faut que ce soit comme ça dans un repas de fête.
Mais que font la maman et la grand-mère du jeune homme, et son papa à l’arrière-plan ? Ils accomplissent le rite des fins de bon repas: mettre dans des petites boîtes blanches tous les restes des plats, que les maîtresses de maison emporteront chez elles.
Retour à la maison. Demain l’oncle d’Amérique part visiter le reste de la famille à la campagne, et m’a invité à venir avec lui (sans ma chère épouse; elle travaille, et elle n’aime pas passer la nuit à la campagne). J’ai eu beaucoup de mal à comprendre son anglo-américain de Houston. Si ça ne marche pas, on parlera chinois.
Quel plaisir de retrouver vos chroniques du quotidien chinois ! Merci, comme toujours. Etrange que presque personne ne sourie sur la photo de famille, c’est la règle en Chine ? j’ai constaté ça en Inde, que je connais beaucoup mieux que la Chine. Plus la photo est importante, plus il faut avoir l’air sérieux dessus !! J’ai hâte de lire la chronique de votre voyage à la camapgne. Bonne balade !
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Merci pour ces images du restaurant.
Je retiens la référence au « Wuliangjie » et j’en ferai l’essai dès que possible.
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