Le village de la famille Li

Encore un mot sur Liu Xiaobo, condamné à la prison parce qu’il est coupable d’avoir diffusé un texte dont il ne faut pas parler (si bien qu’il est très difficile d’expliquer aux Chinois pourquoi le comité Nobel a commis une mauvaise action en lui décernant son prix de la Paix). D’abord il faut aller consulter les commentaires du billet précédent: on y trouve un excellent énoncé en quatre points de la doctrine officielle du Parti, et aussi d’autres avis. Et il faut aussi lire la lettre écrite par des retraités du Parti, qui demandent qu’on arrête de censurer tout et n’importe quoi, même les discours du premier ministre Wen Jiabao. Remerciements à aujourdhuilachine.com qui en parle. Quand on demande à Baidu de rechercher la première phrase de la lettre, il répond « Le résultat de la recherche n’est pas conforme aux lois, règlements et politiques: non affiché. » Google a 200 réponses, mais il faut passer par mon petit tunnel sous la Grande Muraille pour les consulter. 

Je suis en train de lire un livre très intéressant, cadeau de mon ami Alain. Si j’ai bien compris, il faisait partie du petit nécessaire remis à chaque participant de la réunion « Davos à Tianjin » au mois de septembre. Titre « La valeur contemporaine de la culture traditionnelle chinoise », par Zhang Xiping, Editions en langues étrangères de Pékin, 2009. Il a été écrit en chinois et traduit dans toutes les grandes langues du monde. Il explique que l’humanisme chinois inspiré par Confucius va remplacer l’individualisme occidental dans l’avenir du monde. C’est tout à fait cohérent avec le paragraphe précédent. J’en reparlerai quand je serai sûr d’avoir bien compris.

En attendant, voici un souvenir de mon petit voyage avec mes beaux-frères, il y a bientôt trois semaines. Je vais parler avec autorité de la vie à la campagne après y avoir passé trois jours, mais je n’ai pas mieux pour l’instant.

Entrée du village

Le deuxième caractère se retrouve dans nongcunnongcun, la campagne, et dans le nom de beaucoup de quartiers de grandes villes qui étaient des villages avant d’être rattrapés. Le premier caractère, duan, signifie « paragraphe », mais c’est aussi un nom de famille. Nous sommes dans le village des Duan. Le matin, nous étions passés dans le village des parents de ma belle-mère, qui s’appelle Zhi (nom de famille très rare, alors que Li, nom de famille de mon beau-père, est porté par quelques dizaines de millions de personnes); le village s’appelle Zhijiacunzhijiacunvillage de la famille Zhi.

Portail de la famille Li

Voici le portail de la maison de la famille Li. Quand on entre dans une maison, on a devant soi un écran avec un décor en carreaux de céramique.

Entrée avec écran

On tourne à angle droit et on se retrouve devant la façade de l’habitation.

Cour intérieure

A gauche, le bâtiment de la cuisine; à droite l’atelier, qui sert ici à préparer le coton (le petit tas blanc à droite). La salle de bains avec les toilettes est derrière l’écran.

petit déjeuner

Dans la cour, on est à l’abri du vent et on profite du soleil. Tant qu’il fait beau, c’est dehors qu’on mange. Ici nous en sommes au petit-déjeuner du deuxième jour. Le maître de maison est en bleu à gauche, la fille de la la maison, épouse du fils ainé qui vit avec ses parents, sous l’auvent avec sa fille numéro deux sur ses genoux et sa fille numéro un debout près d’elle en jaune. Les autres sont des parents invités. La maîtresse de maison est dans la cuisine. L’arbre est un grenadier. Il y a aussi un jujubier près du portail. On ne voit pas la parabole de la télévision par satellite, derrière le grenadier.

Lion gaucheLion droit

Cette maison date des années 1980, quand on mettait des carreaux blancs rectangulaires sur les façades (c’est passé de mode). Toutes les maisons que j’ai vues dans le village ont le même plan, et un beau portail presque impérial, les portes ornées de bossages comme celles de la Cité Interdite, et gardées par deux lions en céramique. Il n’y a pas beaucoup de place pour les travaux agricoles. On sèche le maïs sur les toits, on stocke le coton dans l’atelier. Les piscicultures du village (la principale activité) ont leurs bâtiments d’exploitation ailleurs.

Salle de séjour

La maison d’habitation est découpée en trois. Au centre la salle de séjour, et une chambre de chaque côté, avec une fenêtre sur la cour; il y a très peu de fenêtres vers l’extérieur; si la maison est assez profonde, les chambres sont divisées en deux, donnant toujours sur la salle centrale; la chambre en arrière est en second jour ou profite de la lumière par une fenêtre haute; pas de couloir. Cette photo a été prise dans la maison d’un voisin qui me logeait; tous les enfants partis, ils se sont offert de nouveaux meubles; chez les Li, c’est plus encombré.

Grand lit

L’espace des chambres est occupé par un lit géant, deux mètres sur trois ou plus, où on dort en collectif. Le jour, les couettes sont repliées et on peut s’installer pour discuter, travailler, mais pas manger.

ang traditionnel

Cette photo  a été prise par Guillaume, un des fils de mon amie Ghislaine, dans une maison du Shandong; ce lit-là est en briques, c’est le « kang » traditionnel, chauffé par un feu qui brûle dessous. A Duancun, je n’en ai pas vu; on a le chauffage central (il y a un radiateur à gauche sur la mauvaise image en haut); la chaudière à charbon est dans la cuisine.

Cuisine

Voici la cuisine. A gauche la cuisinière à gaz, deux feux très puissants, pour fricasser  dans la poële à fond sphérique et chauffer la bouilloire (si on ne préfère pas la bouilloire électrique). A droite le feu électrique à induction pour cuire à la vapeur; pas de four. Au centre, la cuve en céramique de 300 litres qui n’a pas changé de format depuis des siècles; je l’ai reconne sur des dessins. L’eau courante, c’est le robinet qui sort de terre dans la cour; on remplit la cuve de la cuisine, celle de la salle de bains, celle qui est à l’entrée des toilettes, et on puise avec la casserole en plastique rose qui est posée sur le couvercle en bois. Chez les Li, il y a des poissons dans la cuve près des toilettes.

Chauffe-eau solaire

La douche est alimentée par un gros bidon de plastique noir posé sur le toit de la salle de bain, qu’on remplit avec une pompe. On ne s’en sert que l’été. D’autres maisons se sont équipées d’un chauffe-eau solaire à accumulation, qui donne de l’eau vraiment chaude toute l’année. Je ne sais pas s’il est branché sur le circuit d’eau sous pression.

Rue et électricité

Les maisons des familles tournent le dos à la rue. Quand on a fermé son portail, on ne voit plus personne; mais on ne ferme pas le portail le jour quand la famille est à la maison. L’intimité est protégée par l’écran et l’angle droit pour atteindre la cour.

Tracteur et remorque

Un tracteur avec sa remorque. Tout à l’heure, il transportait du charbon en sacs pour une famille. Un camion avait livré un gros tas de charbon devant un portail et les femmes de la maison avaient travaillé à les mettre dans des sacs d’engrais, qui sont partis ailleurs dans le village.

Vendeur de volailles

Je n’ai pas vu de poulailler dans le village, ni entendu un coq. Ce monsieur passe en s’annonçant avec une grosse castagnette. Le panier à l’arrière de son vélo est rempli de demi-poulets cuits, encore chauds. Il vend au poids, avec sa petite balance romaine.

Triporteur

Triporteur arrière

Ce gros triporteur fait une tournée de ramassage du coton. C’est le gros modèle avec une cabine et un volant. Le petit modèle a un guidon et pas de cabine. Celui-ci est bleu, couleur de la campagne. Ceux du chantier sur la route sont jaunes.

Dans la rue

Nous partons rendre visite aux ancêtres de la famille Li qui reposent dans les champs de la famille. C’est pour ça que le cousin d’Amérique est venu (pour voir ses cousins, aussi). Madam Li, à l’arrière,  porte un chapelet de 10 000 pétards.

Vue sur les champs

Nous descendons le petit plateau où est installé le village, vers les champs qui sont presque au même niveau que le lac et les bassins de pisciculture. Le plus près de nous à droite, un champ de coton; plus loin, du maïs.

Champ de coton

Quelqu’un nous salue depuis son champ de coton. Il travaille à la main, aucune machine ne pourrait passer. En fait, il ne s’occupe pas de son coton, mais d’un rang d’aubergines à la lisière du champ.

Cueilleur de coton

Le fils de la famille d’un voisin revient de sa cueillette avec un gros sac de coton sur son vélo.

Butte

Nous sommes arrivés. Ici repose le père de mon beau-père, grand-père ou arrière-grand-père de ceux qui sont venus le saluer. Il est sous cette petite butte, sans plaque ni monument; ses descendants désherbent la tombe chaque printemps, au moment de Qing ming; nous sommes après les pluies de l’été.

Offrandes

Offrandes: des fruits, des cigarettes Marlboro, une bouteille de baijiu, et quelques uns des poulets achetés tout à l’heure. A la fin de la cérémonie, on les emportera pour les manger en famille.

Sapèques de papier

On brûle des quantités de sapèques en papier (les pièces en bronze à trou carré du temps de l’empire). Je les vois dans toutes les cérémonies familiales. Quelquefois, le soir, je croise quelqu’un qui en brûle sur le trottoir ou dans la cour d’une résidence.

Tombe du frère

Nous allons plus loin dans le champ de coton, saluer la tombe du frère ainé de mon beau-père et de son épouse (si j’ai bien compris).

Stèle du frère, vue de près

La stèle a été placée au sud de la butte de terre. On peut lire le nom de Mr Li à droite, et madame Liu à gauche, en dessous des caractèresfumufumu, père et mère. La stèle porte la date de 1999.

Stèle et pétards

Devant chaque tombe, après avoir brûlé les offrandes et s’être inclinés, on déroule un chapelet de pétards. Certains chapelets éclatent très vite, d’autres prennent plus de temps.

Citadins et paysans

Une partie de la famille, citadins et paysans sur trois générations, écoute les pétards. Le fils ainé tient une pelle, prêt à éteindre le feu qui prendrait dans l’herbe. Pas de risque, tout est bien vert et humide.

Autre butte funéraire

Pendant que nous rentrons au village à travers champ, on me désigne une butte d’herbe au milieu du coton; une autre famille. A Zhijiacun, les tombes et les stèles sont rassemblées dans un enclos à l’entrée du village. Les livres d’Histoire racontent que tout avait été effacé au moment de la collectivisation maoïste. Aujourd’hui, tout ressemble à ce que décrivaient les voyageurs du temps de l’Empire.

17 commentaires sur “Le village de la famille Li

  1. « Aujourd’hui la Chine » s’empresse de rapporter n’importe quelle info qui va dans le sens de ce qu’attend un Français, ça rapporte de l’audience et ça fait parler de ce site. Mais attention de mal interpréter la vie politique chinoise en prenant ses désirs pour la réalité ! Le fait que Wen s’exprime sur la liberté d’expression signifie-t-il que le pouvoir central serait divisé, entre le président Hu Jintao, plus orthodoxe, et son premier ministre Wen, plutôt libéral ? Ou assiste-t-on à un jeu de rôles, celui du méchant étant dévolu à M. Hu, tandis que le gentil Wen serait chargé de peaufiner le discours attendu par l’étranger pour calmer les tensions ? Les deux hypothèses ne sont pas forcément contradictoires. En tout cas, pour l’heure, il est impossible de répondre. De toute façon, la « démocratie » version Wen ne signifie pas le droit de vote, la fin du parti unique, le pluralisme politique, et l’absence de contrôle étatique sur les médias. Elle vise plutôt à une démocratisation interne au Parti communiste passant par la reconnaissance des « courants » ainsi que par des formes de délibérations publiques associant la population. Cela s’appelle la « voie chinoise ».

    Sur Liu Xia Bo, je crois qu’il faut aller plus loin que ce que nous montre les médias occidentaux : il y a construction d’un personnage sympa, démocrate… Mais il faut rappeler aussi qu’Il y a plusieurs intellectuels chinois qui ont signé la charte 08, mais pourquoi seul Liu Xia Bo est emprisonné ? Liu Xia Bo ne se contente pas d’exprimer des idées. Il est toujours actif pour créer des mouvements comme ceux de 1989, pour renverser le gouvernement chinois. En plus de cela, il exprime des idées négationnistes sur la colonisation. Pour de nombreux historiens chinois, la période des guerres de l’opium est la période la plus tragique de l’histoire de la Chine : à la fin du 19ème siècle, la mort en masse d’inanition devient une affaire quotidienne banale. Pour Liu Xia Bo, cette période coloniale a trop peu duré. Selon lui, la Chine avait besoin d’être soumise à 300 années de domination coloniale pour pouvoir devenir un pays décent, de type évidemment occidental. Dans un interview, il a exprimé sa célébration de la guerre états-unienne pour l’exportation de la démocratie en Irak.

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  2. ebolavir
    14.10.10 | 14h56
    « Bon, un sinologue qui écrit « … la prestigieuse université Tsinghua, à Pékin » (Xinhua en pinyin, Chine nouvelle en français) n’est pas à une approximation près. Et « la presse officielle déchaînée », vu de Chine, ce serait plutôt le silence; il faut fouiller pour trouver les articles. La spéculation sur la division du Parti ressemble plus à une transposition du passé qu’à la réalité. Quand même, 300 signataires de la charte 08 et un seul en prison, ça aurait mérité qu’on réfléchisse. »

    C’est vous le grand spécialiste de la Chine et ça vous énerve quand vous rencontrez de vrais sinologues. Et alors, vous ne savez pas que l »une des graphies de l’Université Qinghua est aussi Tsinghua? Facile de critiquer quand on est à côté de la plaque. Béjà est un puits de science sur la Chine, il a commencé ses études de chinois dans le Liaoning, littérature dans les années 60. Difficile de trouver un étranger qui manie aussi bien que lui le chinois.

    Monsieur Parier veut parler de l’article de Jean-Philippe Béja, chercheur au CNRS et au CERI-Sciences Po, paru dans Le Monde du 14 octobre: « Le prix Nobel de la paix remis à Liu Xiaobo pourrait diviser le pouvoir à Pékin ». J’utilise mon privilège d’abonné au Monde en ligne pour mettre des commentaires sur des articles qui m’ont intéressé; c’est plutôt pour agacer les bien-pensants qui voient partout des signes de l’effondrement imminent (et espéré) de la Chine que pour enrichir le débat. Il cite donc mon commentaire qui ne lui a pas plu, et qui commence mal. L’université Tsinghua existe bien à Pékin. Son nom s’écrit Qinghua en pinyin mais, comme elle a été fondée en 1911 (l’année où la dernière dynastie impériale s’est effondrée), elle a gardé la vieille transcription de son nom en lettres latines. Comme je disais dans le commentaire, l’expression « presse officielle déchaînée » m’avait donné l’impression que l’auteur parlait par ouï-dire, alors qu’il était bien difficile de trouver autre chose que le communiqué du ministère dans les journaux chinois. Et ils sont si nombreux à parler par ouï-dire. Pas Jean-Philippe Béja, qui lit le chinois sûrement mieux que moi …Il ne faut pas écrire trop vite.

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  3. Béja est un sinologue connu, comme Jean-Luc Domenach. Personne ne remet leur niveau en chinois. Ce qu’on leur reproche, c’est leur prétention à donner des leçons de droits de l’homme. Comment peuvent-ils prétendre juger de problèmes INTERNES d’un pays sans jamais s’interroger sur les catastrophes internationales que les pays occidentaux ne cessent de provoquer chez les autres ? La caricature de cette attitude de « naive » ingérence étant bien sûr ces acteur d’Hollywood qui se mobilisent en faveur du Darfour ou du Tibet et qui jamais ne songent à intervenir pour que s’arrête le massacre quotidien en Irak. Mais nous Français nous leur ressemblons beaucoup, avec ce piment arrogant si particulier qui veut que nous infligions aux peuples que nous colonisons des leçons sur la révolution française, les droits de l’homme universele. Il s’agit d’un comportement imbuvable…

    Bref, quelque soit le niveau de chinois de Béjà, il tient souvent des propos qui paraissent étranges et incompréhensibles aux Chinois. Un des étudiants de Jean-Luc Domenach a fait cette remarque que je partage parfaitement :

    “Jean-Luc Domenach a beaucoup étudié la Chine, mais m’a apparu ingénu il y a quelques années quand j’ai suivi ses leçons au Sc Po de Paris, sur la Chine. J’ai trouvé alors que ce Monsieur qui nous disait qu’il voyageait à travers la Chine depuis des années n’avait pas bien saisi le Tao chinois.

    Dans son explanation de la chose chinoise je trouvais qu’il était techniquement compétent, mais qu’il lui manquait ce feeling de la compréhension de ce qu’on appelle ici ETRE, mais qui est autre chose différente pour le chinois qu’on a dû mal à cerner!

    Passées déjà quelques années de ces conférences je retrouve aujourd’hui ici dans Le Figaro le même professeur dans une interview avec François Jullien. Je suis étonné de retrouver ce même tic ingénu du prof. à propos de la Chine, non pas que son analyse est fausse, mais parce que je trouve qu’il n’a pas toujours compris le Tao chinois.

    Par contre son interlocuteur Jullien, que je lis souvent et de façon récurrente, est un maître dans l’appréhension de l’esprit chinois. Jullien, est selon moi, un des seuls sinologues français qui a cerné le Tao chinois. Et comme il dit, en travaillant dans la connaissance de la Chine, il a appris aussi avec les outils de la pensée chinoise à mieux connaître la pensée européenne et occidentale. Je suis aussi de cet avis, et c’est d’ailleurs aussi, mon approche à moi de ces deux mondes”.

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  4. Je suis désolée de ne pas être en capacité de participer à la hauteur de vue du débat lancé lors du dernier post d’Ebolavir, ma connaissance de la Chine étant totalement en dessous du niveau de la mer par rapport aux propos échangés. A titre personnel, je me réjouis simplement du Nobel attribué à Liu XiaoBo, sans en attendre grand-chose en matière de transformations en Chine. Et je me contente de penser que si les démocraties occidentales ont beaucoup de choses à se reprocher, il est tout à fait excessif et contraire à la réalité de dire que « ces pays ne respectent rien en eux-mêmes », comme je l’ai lu dans un des commentaires. Tout est loin d’être parfait en France, où je vis, mais on ne risque tout de même pas d’être emprisonné pour ses opinions. Je serais tout à fait aussi intéressée de savoir où vit le « Camarade Cai », Français en France ou Français en Chine, je suppose, parce qu’il est vrai que devant quelqu’un qui s’exprime avec une telle force, la question qui vient effectivement à l’esprit est « d’où parles-tu, camarade ? », à tous les sens que pourrait prendre ici le terme « d’où ».
    Ceci étant, si je suis une fidèle de ce blog passionnant et délicieux, c’est justement parce qu’il donne à voir la vie en Chine comme on ne la voit jamais dans les articles de journaux, à fleur du quotidien, très « matter of fact », avec humour mais précision, sans jugement ni intellectualisme sur ce qu’il se passe, ou ce qu’il pourrait, devrait advenir en Chine. Ces « choux chinois » sont ma première fenêtre sur la Chine. J’en profite pour ajouter un détail même s’il devient incongru dans le contexte : en Indonésie aussi, à Bali et Lombock entre autres, la porte d’entrée s’ouvre sur un pan de mur ou un écran sculpté qui cache l’intérieur et oblige à partir à angle droit, ce qui protège effectivement l’intimité, et, paraît-il, protège aussi des esprits néfastes ! J’en profite aussi pour remercier Ebolavir, une nouvelle fois, de l’intérêt et du plaisir procuré par ses chroniques chinoises.

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  5. Bonjour Zélie,

    Merci d’avoir réagi à mes commentaires. Je ne crois pas que ma phrase “ces pays ne respectent rien en eux-mêmes” ne soit pas trop excessive. Vous savez, les pays démocratiques sont plein d’accusations contre la situation des droits de l’Homme dans plus de 190 pays et régions, dont la Chine, mais ferment les yeux sur, ou évite et même dissimule les abus massifs des droits de l’Homme sur leur propre territoire. Ces pays utilisent en fait les droits de l’Homme comme outil politique pour s’ingérer dans les affaires intérieures d’autres pays et diffamer l’image d’autres pays au profit de leurs propres intérêts stratégiques.

    Prenons le cas des Etats-Unis qui prônent la liberté d’expression, la liberté de la presse et la liberté sur Internet mais qui surveillent et limitent sans aucun scrupule la liberté des citoyens quand il s’agit de leurs propres intérêts et besoins. Depuis le 11 septembre, les Etats-Unis ont installé des appareils d’écoute spécialisés dans tout le pays pour surveiller les appels, les fax, les emails et recueillir les communications intérieures. Il y a des journalistes qui sont emprisonnés pour avoir refusé de diffuser leurs sources. La police américaine est connue pour ses preuves de violence sur la population et les abus de pouvoir sont communs chez les exécuteurs de la loi. On peut passer sans problème en revue la situation des droits de l’Homme aux Etats-Unis à travers six thèmes : vie, propriété et sécurité personnelle ; droits civils et politiques ; droits culturels, sociaux et économiques ; discrimination raciale ; droits des femmes et des enfants ; violations des droits de l’Homme par les Etats-Unis contre d’autres pays.

    Quant au prix Nobel de la Paix, il récompense une personne ayant fait avancer la cause de la paix dans le monde. Quelques prix Nobel célèbres:

    – Kissinger, un voyou (c’est un euphémisme) qui orchestre guerres, complots, coups d’état, tortures, comme en Amérique Latine (Chili, etc.).

    – Shimon Peres, « travailliste » (de gauche) qui participe à un gouvernement d’extrémistes de droite et va-t-en-guerre, et qui, d’une voix patheline, fait comprendre qu’il faut être prêt à attaquer l’Iran.

    – Elie Wiesel, tout aussi pathelin, qui ne veut pas qu’on « dévalue » la Shoah (des Juifs) en y incluant les autres victimes même encore plus victimes, proportionnellement, comme les Tsiganes. Ce prix Nobel-là fait ouvertement l’apologie de la guerre (contre l’Iran).

    – Obama, qui enlève une partie des bataillons d’Irak mais… pour les mettre en Afghanistan, et qui mène plusieurs guerres à la fois, jamais rassasié: Pakistan, Somalie, etc. tout en déstabilisant des Etats latino-américains, entre autres. Ce lascar-là nous mènera à la guerre totale contre l’Iran, nucléaire et mondialisée. Avec ce Prix Nobel de la Paix, d’ailleurs, les bases militaires se multiplient aux quatre coins de la planète

    – Liu Xiaobo, un dissident chinois, récompensé parce qu’il s’oppose à son pays non-aligné sur l’Occident. Chirin Ebadi, en Iran cette fois, avait elle aussi été honorée pour sa dissidence.

    Qui dira après ça que les Nobel sont au service de la paix ? Ils sont au service d’un Occident impérialiste, oui !

    PS : Je ne vois pas quoi les questions genre “d’où parles-tu, camarade ?” apportent quelque chose au débat…

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  6. Ce mur-écran (yingbi) se retrouve dans les restaurants. Il empêche effectivement aux mauvais génies de pénétrer à votre suite dans la maison (ils sont très bêtes et foncent tout droit dans le mur). Dans le siheyuan (maison carrée à cours carrée de Beijing), on entre par un portail situé à droite et on se retrouve face à un mur qui clôt la cours. On oblique donc à gauche dans une allée sur laquelle donnent des salles de services (devenus appartement après 1949). L’entrée dans la cours centrale est au centre et le mur-écran en bouche l’accès. On contourne le mur-écran par la gauche. Parfois il est ouvragé.

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  7. Désolée, Cai, je ne partage pas du tout vos analyses, et je n’ai envie ni d’en discuter ni de polémiquer. Et face à des opinions/accusations assénées avec autant d’autorité, oui, je me pose toujours la question de savoir d’où l’on parle : quelle place, fonction, histoire (Chinois de Chine, chinois de France, comme se demandait Ebolavir ?), etc., autorise une telle sûreté de soi, qui pour moi a une connotation presque violente. Mais je comprends tout à fait que vous ne vouliez pas en parler. De toute façon, encore une fois, ce qui m’intéresse dans ce blog, que je fréquente assiduement, est tout autre.

    Merci à Movitcity pour ses précisions sur les murs-écrans ! Je suppose que s’ils persistent dans les restaurants, c’est parce qu’ils rappellent une tradition largement appréciée (je suis depuis allée voir à quoi ressemblaient les siheyuan !). Et j’adore l’idée -partagée par les Indonésiens, visiblement- que les esprits mauvais sont assez stupides pour foncer tête baissée dans l’écran en face d’eux, et ne pas savoir se glisser de côté ! Vive l’esprit malicieux des êtres humains…

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  8. Il n’est pas dit que certains humains ne foncent pas aussi tout droit dans le mur-écran tellement leur sectarisme les aveugle….
    Yu Hua vient de sortir un livre dont le titre français est « La Chine en dix mots ». C’est très honnête, très doux malgré les atrocités rapportées et éclairant. Une vraie manière chinoise de parler de la Chine et de ses difficultés comme de ses réussites. Une manière de lettré ou de sage.
    Depuis quelques mois, des frémissements se font sentir qui laisse augurer que la Chine bouge même dans ces domaines encore interdits… c’est que la Chine pourra encore nous étonner.

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  9. Zélie, ce qui fait autorité ce sont les faits et l’argumentation. Vous êtes libre de ne pas être d’accord avec ce que je dis ou pas, mais vous ne pouvez pas nier les faits qui se vérifient si on se donne la peine de chercher un peu sur internet. D’ailleurs, je viens de voir une émission sur arté : « un taxi pour l’enfer ». Ce documentaire explique comment la plus grande démocratie du monde en venue après le 11-Septembre à justifier le recours à la torture. Fruit d’une enquête approfondie, ce documentaire se concentre sur l’usage de la torture, qui causa la mort de plus d’une centaine de (prétendus) prisonniers de guerre – plus du tiers ayant été reconnu comme des homicides. La pensée, la parole ne sont pas gratuites. Si vous estimez libre de nier les faits que j’ai exposés, soyez prêt alors à assumer les conséquences pratiques de vos propos : se faire complice des médias qui diffusent une représentation du monde où d’un côté il y a des méchants chinois et de l’autre des gentils occidentaux, et les gentils doivent faire la guerre aux méchants.

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  10. Bien d’accord avec vous, Movitcity, il est vrai que certains humains foncent droit sur tous les murs-écrans qu’ils rencontrent ! Merci pour les coordonnées du livre de Yu Hua, si je comprends bien on peut le trouver en français ? Je vais le lire.
    Et si vous allez sur le site internet du Monde aujourd’hui (et d’autres, je suppose), Cai, vous verrez que les médias sont loin de donner une image manichéiste des « méchants chinois et des gentils occidentaux », les occidentaux étant montrés sous le jour le plus noir (ce qui va dans votre sens d’ailleurs) ! Mais c’est ça une démocratie pour moi : un régime où l’on peut parler de ce qui marche ET de ce qui ne marche pas, de ce qui avance et de ce qui est horrible. Le pire système politique à l’exclusion de tous les autres, comme disait Churchill…
    Bon week-end en tous cas, et à tous ceux qui passent sur ce blog, et courage à ceux qui doivent affronter le typhon Megi.

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  11. L’Occident est un peu comme un juge corrompu qui n’applique pas la loi. Il fait le mal mais il sait que c’est mal. Le pouvoir chinois actuel considère qu’oublier les lois, c’est bien, quand c’est dans l’intérêt général qu’il définit lui-même. Les « dissidents » ne demandent pas grand-chose de plus qu’un gouvernement qui n’est pas au-dessus des lois. Après, on pourra discuter du changement des lois, comme on le fait en Occident. Aussi bien, dans l’histoire du XXe siècle, ce sont les régimes démocratiques qui ont survécu aux malheurs, pas les régimes totalitaires. Pas de raison que le XXIe siècle soit différent.

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  12. Ce que demande Liu Xiao Bo, c’est un changement de régime. Puis-je néanmoins rappeller à toutes fins utiles que quiconque en France souhaiterait « remettre en cause la forme républicaine de l’Etat » (sic) serait passible de la Haute Cour de Justice de la république ? Le saviez-vous ?

    La Chine a pris l’option inverse de celle de l’URSS de 1990. Pas de Perestroika, pas de Glasnost. Mais une très précise instauration de l’économie de marché. La Bourse à Shanghai. Une économie de plus en plus offensive. Et surtout, ne pas relâcher le pouvoir. Tenir. Tenir ce pays-continent. Tenir 1 MILLIARD et 300 MILLIONS d’humains. Pendant que nous ne savons même pas tenir nos banlieues. Les chinois ont pris l’option inverse de la Russie pour sortir du XXème siècle. Et… à qui l’Histoire donne-t-elle raison ? Quel est le pays le plus sûr ? le plus fiable ? le plus riche ? avec le futur le plus prometteur ? la Chine ou la Russie ?

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  13. « dans l’histoire du XXe siècle, ce sont les régimes démocratiques qui ont survécu aux malheurs, pas les régimes totalitaires. »

    Je suis désolé, mais Hitler a été élu démocratiquement… Par ailleurs, c’est un mythe que de croire que ce sont les régimes démocratiques qui ont survécu aux malheurs de la guerre. N’importe quel historien sérieux vous dira que ce ne sont pas les USA qui ont sauvé le monde de la folie de Hitler, mais l’armée rouge en Europe et l’armée populaire en Chine. Voici un extrait d’un texte de Nico Hirtt :

    « Quand les Américains et les Britanniques débarquent sur le continent, ils se trouvent face à 56 divisions allemandes, disséminées en France, en Belgique et aux Pays Bas.

    Au même moment, les soviétiques affrontent 193 divisions, sur un front qui s’étend de la Baltique aux Balkans. La veille du 6 juin, un tiers des soldats survivants de la Wehrmacht ont déjà enduré une blessure au combat.

    11% ont été blessés deux fois ou plus. Ces éclopés constituent, aux côtés des contingents de gamins et de soldats très âgés, l’essentiel des troupes cantonnées dans les bunkers du mur de l’Atlantique.

    Les troupes fraîches, équipées des meilleurs blindés, de l’artillerie lourde et des restes de la Luftwaffe, se battent en Ukraine et en Biélorussie. Au plus fort de l’offensive en France et au Benelux, les Américains aligneront 94 divisions, les Britanniques 31, les Français 14. Pendant ce temps, ce sont 491 divisions soviétiques qui sont engagées à l’Est.

    Mais surtout, au moment du débarquement allié en Normandie, l’Allemagne est déjà virtuellement vaincue. Sur 3,25 millions de soldats allemands tués ou disparus durant la guerre, 2 millions sont tombés entre juin 1941 (invasion de l’URSS) et le débarquement de juin 1944. Moins de 100.000 étaient tombés avant juin 41. Et sur les 1,2 millions de pertes allemandes après le 6 juin 44, les deux tiers se font encore sur le front de l’Est.

    La seule bataille de Stalingrad a éliminé (destruction ou capture) deux fois plus de divisions allemandes que l’ensemble des opérations menées à l’Ouest entre le débarquement et la capitulation.

    Au total, 85% des pertes militaires allemandes de la deuxième guerre mondiale sont dues à l’Armée Rouge (il en va différemment des pertes civiles allemandes : celles-ci sont, d’abord, le fait des exterminations opérées par les nazis eux-mêmes et, ensuite, le résultat des bombardements massifs de cibles civiles par la RAF et l’USAF).

    Le prix payé par les différentes nations est à l’avenant.
    Dans cette guerre, les Etats Unis ont perdu 400.000 soldats, marins et aviateurs et quelques 6.000 civils (essentiellement des hommes de la marine marchande). Les Soviétiques quant à eux ont subi, selon les sources, 9 à 12 millions de pertes militaires et entre 17 et 20 millions de pertes civiles.

    On a calculé que 80% des hommes russes nés en 1923 n’ont pas survécu à la Deuxième Guerre Mondiale. De même, les pertes chinoises dans la lutte contre le Japon — qui se chiffrent en millions — sont infiniment plus élevées — et infiniment moins connues — que les pertes américaines.

    Ces macabres statistiques n’enlèvent bien évidemment rien au mérite individuel de chacun des soldats américains qui se sont battus sur les plages de Omaha Beach, sur les ponts de Hollande ou dans les forêts des Ardennes.

    Chaque GI de la Deuxième guerre mondiale mérite autant notre estime et notre admiration que chaque soldat russe, britannique, français, belge, yougoslave ou chinois. Par contre, s’agissant non plus des individus mais des nations, la contribution des Etats Unis à la victoire sur le nazisme est largement inférieure à celle que voudrait faire croire la mythologie du Jour J. »

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  14. Bonjour,
    Pour répondre à la question initiale du prolixe camarade Cai sur la censure de l’annonce du prix Nobel de la Paix à M. Liu en Chine, une petite expérience personnelle : il manquait quatre pages au numéro de l’édition internationale de L’Express que j’ai acheté dans un aéroport d’une grande métropole chinoise samedi fort tard. (C’est tout de même merveilleux de pouvoir trouver cette presse en Chine, n’est-ce pas ? J’avais hésité avec Paris Match pour combler le temps d’attente de mon avion…). Ce n’était pas un accident. Combien de lecteurs pour L’Express en Chine, vu le faible nombre de francophones, le prix du canard (38 RMB, tout de même, soit dix fois le prix d’un magazine chinois), et la très faible distribution. Et pourtant, même pour ces quelques dizaines ou centaines de personnes, un service veille…

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  15. Assez d’accord avec Ebolavir qui donne l’image de l’Occident vu comme un juge corrompu qui n’applique pas la loi mais qui SAIT qu’il fait le mal. Je dirais, souvent comme les politiques occidentaux, en particulier. Et j’ajoute : et qui savent aussi qu’ils peuvent se faire prendre la main dans le sac et avoir à rendre des comptes, que ce soit grâce aux journalistes, à la justice, ou … aux élections (au passage : c’est bien ça, la démocratie !). D’accord aussi avec le reste du post.

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  16. Amusant… D’après Zélie et Ebolavir, les Occidentaux dans des démocraties savent que ce qu’ils font sur le reste de la planète c’est mal. Mais surtout qu’on continue de donner les leçons aux Chinois et on change rien….

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