L’automne à Pékin

Vendredi nous avons pris le train puis le métro, de Tianjin à Pékin, à l’ambassade de France, service des visas, pour renouveler le visa de conjoint de mon épouse. Elle a apporté le dossier, avec une copie de l’acte de mariage reçue par la poste depuis Nantes (alors que l’original de la transcription est dans les registres du consulat, la porte à côté, mais l’administration de l’état-civil est une grande chose), le livret de famille bleu du ministère des affaires étrangères, son passeport, et moi en personne comme preuve de la vie commune. Pas de queue ni de rendez-vous. L’ambiance du bureau des visas a changé depuis que l’ambassade envoie les demandeurs de visa ordinaires à une société située quelque part dans Pékin. Les conjoints de Français sont privilégiés et sont encore reçus à l’ambassade. Il y a deux semaines, ma chère épouse qui est fonctionnaire et sait se débrouiller avec une démarche administrative avait voulu y aller seule et le dossier ne convenait pas. Tout s’est bien passé cette fois. La dame qui a reçu mon épouse lui a demandé en français si elle parlait français, en anglais si elle parlait anglais. J’ai senti passer une ombre de soupçon, … est-ce que celle que j’ai devant moi est bien celle dont les papiers disent qu’elle vit avec un  Français depuis bientôt cinq ans ? … et je me suis permis de dire en chinois qu’elle ne parlait aucune des deux langues. « Mais alors, vous vous parlez en chinois ! « . J’ai failli ajouter qu’ainsi nous ne pouvons pas nous disputer puisque nous ne nous comprenons pas, mais je me suis retenu; d’ailleurs ce n’est pas tout à fait vrai. Dans quelques jours, je retournerai à Pékin chercher le passeport qui contiendra le nouveau visa « conjoint de Français, court séjour » qui permet d’aller en France aussi souvent qu’on le désire, à condition de ne pas rester plus de trois mois chaque fois.

YuanmingyuanEt comme il faisait beau et qu’il n’était que 11 heures du matin, nous sommes allés, toujours en métro, au Jardin brillant et rond, Yuanmingyuan (lire les caractères de droite à gauche).

Ceux qui ont lu l’Histoire savent que c’était le palais de Versailles de l’empereur Qianlong des Qing  (La Cité Interdite étant le Louvre), où il avait fait construire, sous la direction des pères Jésuites envoyés à son service par le roi de France, un palais européen avec fontaines et jeux d’eau. Il avait ainsi dans son imense jardin des palais de toutes les nations sous le Ciel. En 1860, la reine d’Angleterre Victoria et l’empereur Napoléon III envoyèrent leurs généraux régler un problème diplomatique de traités commerciaux. Ceux qui veulent savoir ce qu’il y avait dans les traités peuvent les lire en anglais et en français . L’article 51 du traité avec l’Angleterre prévoyait que la Chine n’utiliserait plus le caractèreyiyi , « barbare » , pour désigner les Européens dans les documents officiels. L’article 13 du traité français prévoyait que les missionnaires pourraient exercer librement leur commerce.

Pont en ruine et visiteur

On sait que les Anglais et les Français trouvèrent une bonne raison pour débarquer en force armée, arriver à Pékin, et piller le Yuanmingyuan, le « sac du Palais d’Eté ». Et aujourd’hui les visiteurs contemplent les ruines de ce qui était en pierre. Ce qui était en bois a brûlé. Ici, c’est ce qui reste d’un des ponts qui enjambaient les canaux du jardin.

Pancarte du pont

Quand nous sommes venus la première fois en 2006, une pancarte vengeresse à l’entrée du pont rappelait la date et le rôle des armées européennes. Et puis elle a été remplacée, comme d’autres, par un panneau historique en belle pierre.

Pont à une arche de pierre

Le jardin a été abandonné après le passage des Européens; l’empereur s’est contenté du « nouveau Palais d’Eté » que l’impératrice Cixi (Tseu-Hi) fit ensuite embellir avec le budget destiné à la marine de guerre. En 1980, quand il a été aménagé en parc public, des agriculteurs y étaient installés et le cultivaient.

Etudiants en peinture

Des étudiants de l’école  des Beaux-arts, section « peinture occidentale », travaillent sur un sujet de paysage d’automne.

Arbre d'automne

Voici leur sujet (le petit rectangle noir au centre n’est pas un artefact, c’est une pancarte qui dit de faire attention à ne pas tomber). En se penchant sur l’eau, on voit en vrai la lithographie de Mauritz Escher « Trois mondes ».

Trois mondes

Escher

Dans la réalité, le poisson ne s’est pas montré.

Saules pleureurs

Nous suivons le chemin de la promenade au bord de l’eau. Il faudrait presque une journée pour le suivre en entier.

Miroir du paysage

Sur le miroir destiné aux pilotes des bateaux de promenade, on voit l’entrée dufuhaifuhai, la mer du bonheur au centre du jardin.

Bord du fuhai

Un panneau de pierre nous explique qu’à cet endroit s’élevait un des pavillon où l’empereur s’installait pour prendre plaisir au spectacle du coucher de soleil sur son lac. On parle d’en reconstruire quelques uns. Les socles de pierre existent toujours, où on posait les bases de colonnes des pavillons de bois comme les pieds de meubles géants.

Jardin à vol d'oiseau

Dans le pavillon d’exposition qui réunit les souvenirs du parc (dont les gravures du Palais d’occident, imprimées en France au temps du roi Louis XV), on peut regarder cette image rêvée du jardin comme personne ne l’a jamais vu. La Mer du bonheur est le carré au centre.

Plan du parc

Encore une station devant le plan du parc à l’entrée. Nous reprenons le métro (avis aux touristes: la ligne 4 est directe du parc à la gare du Sud) pour rentrer à la maison.

Ce matin, le service des visas de l’ambassade a téléphoné. Le passeport est prêt. Je retourne demain pour le chercher. Si le ciel est bleu, je retournerai peut-être au jardin.

4 commentaires sur “L’automne à Pékin

  1. Je suis bien ingrate ces derniers temps ; je parcourres vos post avec ravissement et je suis trop paresseuse pour vous témoigner quelque gratitude que çe soit sous forme de simples mots;merci de prendre le temps de nous partager de si pertinentes anecdotes photos comprises.

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  2. Bonjour,

    Pour info, le visa pour le France de longue durée n’est pas beaucoup plus complique a obtenir et il est valable un an avec plusieurs entrees.

    Mon épouse en a reçu un récemment.

    Enfin, visiter l’ambassade a Pekin est vraiment une torture. Ce copier-coller de bureaucratie a la française, de nonchalance et de manque d’efficacité me rebute.

    Ceci dit, c’est gratuit, et on n’est mieux reçu qu’a l’usine a visa sur 东直门。

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