Nos amis parisiens Wang sont à Tianjin. Lui est né à Tianjin, et il vient voir ses parents, son frère, et ses amis. Mon épouse le connaissait avant de me rencontrer, et je le connais parce que j’ai été à l’université avec elle, moi pour apprendre le chinois, elle pour apprendre à l’écrire et avoir un diplôme. Et c’est donc à cause d’eux que nous nous sommes rencontrés, mon épouse et moi.
Les voila dans notre appartement. Il regarde son courrier sur sa tablette Samsung, coréenne, fabriquée en Chine, avec des programmes américains, et je viens de lui installer un accès à mon tunnel sous le Grande Muraille fourni par une entreprise des Seychelles. Il pourra accéder à Facebook dont il était privé depuis qu’il est en Chine. C’est ça la mondialisation. D’ailleurs il est devenu Français, ce qui fait qu’il n’est plus Chinois, et il a un visa pour visite familiale obtenu avec une invitation de ses parents. Sa femme est Française de naissance et n’aurait pas pu devenir Chinoise s’ils avaient décidé de s’installer en Chine, ce qui est faisable maintenant qu’elle est en retraite. Mais lui n’y tient pas tellement. La vie en France est meilleure pourvu qu’il puisse revoir la famille et les amis quand il en a besoin.
En Chine, comme vous le savez (ou pas), la fête nationale, qui commémore le jour de 1949 où Mao Zedong annonça la refondation de la République, depuis la galerie de la Porte de la Paix Céleste. J’aime bien répéter que c’est là qu’étaient proclamés depuis cinq siècles les édits de l’Empereur, devant les fonctionnaires massés en bas sur la place.
L’image idéalisée et invraisemblable, depuis les nuages dans le ciel bleu jusqu’aux tapis et aux fleurs (ceux qui y étaient racontent qu’il n’y avait plus rien à Pékin), et la réalité (Zhou enlai en blanc à droite). Pour célébrer l’anniversaire, tout le monde a une semaine de vacances. Et maintenant qu’ils ont les moyens, les gens de Tianjin, nous aussi, partent en week-end prolongé. Cette fois nous sommes seize, mon épouse et moi, la famille Wang, grand-parents, deux couples de parents, un petit-fils, et des amis, dans quatre voitures, dont une voiture de fonction détournée de son usage, nous sommes au pays de l’arrangement.
Ces photos ont été prises à un des deux arrêts sur l’autoroute en direction de Jixian, à 120 kilomètres de Tianjin, lieu de villégiature avec la montagne (le parc national de Panshan), les lacs, et la Grande Muraille (Huangyaguan, la passe des Falaises Jaunes). Avis de Ghislaine sur les toilettes des dames : « C’est comme les soldes, on se les arrache ». Je m’étais arrêté ici pour la première fois il y a 9 ans, en 2005, en voyage organisé, le 1e octobre aussi. Il y avait beaucoup moins de monde, des autocars, et très peu de voitures. L’autoroute était presque déserte. Pour voir la carte, cliquer ici. Pékin est à gauche (à l’ouest) et Tianjin en bas au sud.
Une fois Jixian dépassé (c’est une ville de 300.000 habitants, 800.000 dans le district, mais classée « campagne »), nous roulons vers la montagne, et le gîte à la ferme où tout est prévu. Sur le chemin, petit déjeuner tardif au bord de la route.
A table, les grand-parents Wang et le petit-fils. Sur l’enseigne rouge (de haut en bas et de gauche à droite) ting che arrêter voiture ; xiuxi se reposer ; canyin à manger à boire ; zhusu passer la nuit.
Ils surveillent la cuisine, qui doit être en vue des hôtes, et donc ici au bord de la route.
La dame au masque étend des crêpes de pâte à l’huile. Le monsieur en tablier rouge à gauche les trempe habilement dans l’eau bouillante, la pâte foisonne et forme des bulles.
On peut manger dehors, ou dedans. Dans les grands bols, de la bouillie de riz et du tofu frais dans un bouillon; le tofu frais ressemble exactement au lait caillé. C’est le menu de tous les restaurants de petit-déjeuner; il ne manque que les petits légumes confits au sel.
La route est devenue un petit chemin de béton qui monte, au ras des champs (ici un carré de soja). C’est à ce moment que mon appareil photo est tombé en panne, et le reste des illustration est fait avec mon téléphone, ou celui de Ghislaine.
On entre sur les terres de famille de notre hôte. Il a des vergers de kakis et d’azeroles, il fait aussi du maïs et des oignons. Je reparlerai de l’agriculture de l’endroit dans un autre article.
Nous arrivons. Le gîte rural est fait de bungalows semés sur la pente autour d’un bâtiment commun qui abrite le restaurant. Notre bungalow est en haut à droite.
Le bungalow vu de l’arrière. Le bloc sanitaire-douches est sous le chauffe-eau solaire. Un des travailleur de la ferme est en train de cueillir des kakis presque mûrs pour nous éviter de les recevoir sur la tête ou de marcher dedans (et puis, un kaki mûri sur l’arbre est bien plus délicieux que tout ce qu’on peut trouver au marché; le kaki bien mûr est intransportable). Les arbres étaient là avant les constructions et continuent de produire.
L’intérieur du bungalow, le salon avec une table de jeu, des fauteuils et la télévision (téléviseur d’époque mais avec un récepteur satellite).
Une des trois chambres. Celle-ci a trois lits à une personne.
Une autre chambre. Celle-ci a un kang, l’estrade en briques et carrelage de deux mètres de profondeur, où on peut dormir aussi nombreux qu’on peut, la tête vers l’extérieur, chacun enroulé dans sa couette. C’est l’arrangement traditionnel de la campagne. Ceux qui servent toute l’année sont chauffés, avec un fourneau à une extrémité, de l’autre côté du mur, et la cheminée à l’autre extrémité. Ce logement-ci ne sert que l’été. Le jeune homme au milieu est un petit empereur de huit ans; il a deux parents, quatre grand-parents (ceux du côté paternel sont avec lui), un oncle qui vit en France donc ne compte pas. Pour l’instant il s’inquiète quand aucun adulte ne s’intéresse à lui.
Vus de la terrasse de notre logement, la salle commune dehors et dedans, et un autre bungalow avec sa petite cour.
Repas de midi. Les dames sont entre elles. Les hommes se sont réunis dans un des salons particuliers à gauche, ce qui leur permettra de boire du baijiu sans encourir de reproches. Le baijiu, la vodka chinoise, est bu à table dans des verres à eau, une gorgée à chaque toast, et comme il titre entre 40 et 63 degrés, il est redoutable. Les dames n’en boivent pas.
Préparation du repas du soir. La cuisinière nous aurait servi un agneau rôti, mais comme le groupe veut des brochettes, il faut les faire nous-même, trop de travail. Au fond, d’autres vacanciers jouent aux dominos. Le gîte rural accueille environ 40 clients pour les derniers jours de la saison.
Petit-déjeuner du lendemain matin à la table des dames. La journée de séjour, repas du soir, logement, et petit-déjeuner, coûte 90 yuans (11.63 euro au cours du jour).
Le patron de la maison préside à la réparation du remplissage automatique de la réserve d’eau. Il a capté une source qui remplit un grand réservoir enterré, trop bas pour alimenter les blocs sanitaires, si bien que chacun est équipé d’une pompe électrique pour remonter l’eau. Tout cela marche à peu près bien, mais n’a pas été conçu pour durer très longtemps.
Vue d’un autre bungalow, avec comme les autres eau chaude solaire et télévision par satellite. Ca ressemble plus aux dessins de Reiser qui illustraient les articles sur les modes de vie alternatifs de l’Hebdo Hara-Kiri qu’à un dépliant touristique, mais ça marche.
Le couloir à ciel ouvert, le salon à droite, les chambres à gauche. Pour une nombreuse compagnie, il y a de quoi loger 15 personnes. Nous les avons vus partir le matin en minibus.
La salle de jeu, avec au centre une petite machine à jeter les dés sans que personne y touche, et la fontaine à eau bouillante-eau tiède qui indique que nous sommes bien en Chine. Bricolage: le plateau où est posée la construction est si étroit que l’étai du poteau qui porte la ligne électrique traverse la salle.
Et maintenant qu’on est arrivé au gîte rural, à un quart d’heure à pied du premier hameau ?
D’abord c’est une exploitation agricole en activité. Je croise celui qui va nourrir les cochons avec les restes de la salle à manger.
Les citadins peuvent rendre visite aux cochons et aux poules.
Et on peut cueillir les azeroles sur les arbres; elles sont presque mûres. On les voit sur les marchés en ville autour du 1e novembre, et en rondelles séchées pour faire des infusions le reste du temps.
On peut continuer à monter en suivant les sentiers jusqu’aux vergers de kakis haut placés, et continuer jusqu’à la forêt, et même se perdre comme Ghislaine qui est redescendue par erreur sur un autre versant. Heureusement la maîtresse de maison du gîte l’a reconnue et l’a ramenée sur son triporteur en même temps que les courses.
Et puis, au moment du départ, on compare les fruits, les haricots, les noix, les potirons et les choux vendus par le patron du gîte à ses hôtes. Il vend aussi des oeufs cuisinés dans leur coquille, dans des belles boîtes cadeau. Tout le monde est content.
De retour à la maison, ma chère épouse entreprend de faire elle-même des azeroles séchées. Elle a aussi aligné sur le rebord de la fenêtre cinq kilos de kakis, qui vont mûrir et être bons à manger tous en même temps.
Justement, c’est ça qu’on voit par la fenêtre en ce moment. Les arbres de la rue ont encore leurs feuilles. Les bâtiments jumeaux illuminés en blanc n’étaient pas là l’année dernière. Les citadins auront de plus en plus besoin de passer un peu de temps à la campagne. (photo prise par Ghislaine avec son téléphone, pas mal.)
Tant que j’y pense, vous pouvez aller visiter un gîte rural bien plus chic, du côté de Xi’an, en consultant le blog où Ghislaine, Chinoise de Paris, raconte à ses amis ses aventures en Chine. Au moment où j’écris, elle est dans l’avion quelque part au-dessus de la Russie. Son époux est resté encore quelques jours avec ses parents et ses amis. Elle n’avait pas vu la Chine depuis cinq ans et s’intéresse à des choses que je ne vois plus.
Merci pour ce dimanche à la campagne
« Elle n’avait pas vu la Chine depuis cinq ans et s’intéresse à des choses que je ne vois plus. »
Il me semble cependant que vous gardez encore une belle capacité d’étonnement et de savoir le transmettre..
Cordialement
Merci
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« Et c’est donc à cause d’eux que nous nous sommes rencontrés, mon épouse et moi. »
« A cause de », en général, c’est pour un aspect négatif, ne vaudrait-il pas mieux mettre « grâce à » ? 😉
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Selon le moment, je pense que c’est par leur faute, ou bien grâce à eux, que je me suis marié. Il paraît que c’est la même chose pour tous les couples (mon expérience limitée ne me permet pas de l’affirmer). Donc j’ai choisi le « à cause d’eux » qui n’a pas d’opinion.
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Au musé de Hong Kong, il y a longtemps qu’ils ont compris le problème des toilettes pour dames, moyennant quoi, il y en a trois fois plus que pour leurs compagnons masculins.
Organisons des visites du musée de Hong Kong à l’échelon mondial afin de faire avancer la cause des femmes.
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